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TP : mesure de la vitesse de la lumière

Objectif : mesurer la vitesse de la lumière dans différents milieux à l'aide d'un dispositif opto-électronique qui tient sur une paillasse.

Prérequis : notion d'indice de réfraction et de déphasage.

Aspects théoriques

Un peu d'histoire..

On doit à Römer (1676) la première prise de conscience du fait que la lumière se propage vite mais à vitesse finie. En effet, en analysant des données de Cassini sur les éclipses des satellites de Jupiter il déduit qu'il faut 22 minutes à la lumière pour parcourir une distance égale au diamètre de l'orbite de la Terre (ce qui donne environ 225 000 km/s). En 1728, James Bradley démontre expérimentalement que la terre tourne autour du soleil à partir du phénomène d'aberration de la lumière des étoiles. En prime il détermine plus précisément la vitesse de la lumière qu'il estime à environ 303 000 km/s. En 1849 Fizeau obtint environ 315 000 km/s en utilisant un système mécanique de miroirs et une roue dentée en rotation (la vitesse de la roue était ajustée pour permettre le passage du rayon lumineux à l'aller, puis au retour après une réflexion sur un miroir). Ensuite, Foucault reprit le même genre d'expérience (la roue dentée fut remplacée par un miroir en rotation) et sa mesure la plus précise, en 1862, s'approcha de la valeur actuelle, soit environ 300 000 km/s. Plus tard, Michelson montra que la vitesse de la lumière dans le vide ne dépend plus de la longueur d'onde. Le fait que la lumière puisse se propager dans le vide a longtemps perturbé les physiciens. En effet, toutes les ondes connues avaient besoin d'un milieu matériel pour se propager. C'est ainsi qu'ils supposèrent l'existence d'un milieu spécial qui devait autoriser la propagation de la lumière : l'éther, dont les Grecs avaient déjà parlé dans leur cosmologie. C'est alors que Michelson et Morley tentèrent de mettre en évidence expérimentalement un mouvement terrestre par rapport à l'éther (le «vent d'éther» devrait changer relativement à la Terre, en 6 mois d'intervalle, à cause du mouvement de la Terre autour du Soleil). Mais les résultats de leurs expériences ne permirent jamais de détecter ce vent d'éther. Peu après, Einstein va s'inspirer de ces «expériences négatives» pour postuler la constance de la vitesse de la lumière dans le vide, quel que soit le référentiel d'observation : c'est le postulat de la Relativité Restreinte (1905) qui débouchera sur la fameuse relation $E=mc^{2}$.

Principe de la mesure opto-électronique de $c$

Une diode LED émet une lumière rouge dont l'intensité est modulée à la fréquence $f_{\rm mod}=$ 50.1 MHz. La lumière après avoir parcourue une distance $L$ est reçue par une photodiode dont la réponse est proportionnelle à l'intensité. La photodiode reçoit donc un signal déphasé (à cause du retard due à la vitesse de propagation finie de la lumière) qui permet de remonter à la vitesse de propagation de la lumière. Pour permettre la visualisation du signal à l'aide d'un oscilloscope classique on mélange le signal reçu avec un signal stable de fréquence $f_{\rm ref}=$ 50.05 MHz.

Principe de la mesure

Ainsi on obtient un signal en sortie du mélangeur qui possède deux composantes : une composante haute fréquence qui sera ignorée par l'oscilloscope (car en dehors de sa bande passante) et un signal basse fréquence (environ 50 kHz) qui sera visualisé à l'oscilloscope. Le point clé est que l'opération de mélange conserve l'information sur le déphasage ; voyons comment.

La diode émettrice est alimentée par un signal électrique qui permet de moduler l'intensité de la lumière émise : \[s_{\rm e}(t)=A+B\cos(2\pi f_{\mathrm{mod}}t)\] La diode réceptrice produit un signal électrique proportionnel à l'intensité reçue : \[s_{\rm r}(t)=\alpha\times s_{e}(t-L/c)= \alpha A+\alpha B\cos\left(2\pi f_{\mathrm{mod}}t-\frac{2\pi f_{\mathrm{mod}}L}{c}\right)\] où $c$ est la vitesse de la lumière. Le terme $L/c$ représente le retard dû à la propagation de la lumière. Le signal reçu est donc en retard de phase avec un déphasage

\begin{equation} \boxed{\displaystyle \phi=\frac{2\pi f_{\rm mod}L}{c} } \label{eq:TPC1} \end{equation}

Evidemment dans le cas où la lumière traverse $N$ milieux différents pour lesquels la vitesse de propagation est $c_{i}$ on obtient

\begin{equation} \boxed{\displaystyle \phi=2\pi f_{\rm mod}\sum_{i}\frac{L_{i}}{c_{i}} } \label{eq:TPC2} \end{equation}

où $L_{i}$ désigne la distance parcourue par la lumière dans chaque milieu.

Le signal reçu est mélangé, c'est-à-dire multiplié par un signal harmonique de référence de fréquence $f_{\rm{ref}}=$ 50.05 Mhz. À la sortie du mélangeur, on obtient : \[\begin{array}{ccc} \alpha A+\alpha B\cos(2\pi f_{\rm{mod}}t+\phi)\\ \times & \mapsto & \alpha A\cos(2\pi f_{\rm{ref}}t)+\alpha B\cos(2\pi f_{\rm ref}t).\cos(2\pi f_{\rm{mod}}t+\phi)\\ \cos(2\pi f_{\rm{ref}}t)\end{array} \] c'est-à-dire \[\alpha A\cos(2\pi f_{\rm{ref}}t)+\frac{\alpha}{2}B\left[\cos\left( 2\pi(f_{\rm{mod}}+f_{\rm ref})t+ \phi\right)+\cos\left(2\pi(f_{\rm{mod}}-f_{\rm ref})t+\phi\right)\right]\] Or, la bande passante de l'oscilloscope étant [0, 20 MHz], toutes les fréquences dépassant 20 MHz sont éliminées. Ainsi, la composante de fréquence $f_{\rm mod}+f_{\rm ref}\simeq$100 MHz disparaît et celle de fréquence $f_{\rm mod}-f_{\rm ref}\simeq$ 50 kHz est vue par l'oscilloscope. Finalement, le signal sur la voie Y de l'oscilloscope s'écrit \[s_{Y}=\frac{\alpha B}{2}[\cos(2\pi(f_{\rm mod}-f_{\rm ref})t+\phi)]\] alors que sur la voie X on a \[s_{X}=\frac{B}{2}[\cos(2\pi(f_{\rm mod}-f_{\rm ref})t)]\] On voit donc que l'information sur la phase est conservée et que le signal récupéré par l'oscilloscope oscille à une fréquence $f=f_{\rm mod}-f_{\rm ref}\simeq$ 50 kHz, inférieure à la fréquence de coupure de l'oscilloscope (20 MHz).

Visualisation en mode XY

Lorsque l'on injecte le signal $s_{X}$ sur la voie X et le signal $s_{Y}$ sur la voie Y d'un oscilloscope, et que l'on commute l'oscilloscope en mode XY, on obtient une courbe paramétrique d'équation \[\left\{\begin{array}{rcl} X(t) &=&a\cos(\omega t)\\ Y(t) &=&b\cos(\omega t+\phi) \end{array} \quad\text{avec}\quad \omega = 2\pi(f_{\rm mod}-f_{\rm ref}) \right.\] Il s'agit de l'équation paramétrique d'une ellipse circonscrite dans un rectangle $2a\times 2b$ et dont l'excentricité $e$ varie avec $\phi$. Cette représentation permet de repérer aisément la situation ou $\phi =k\pi$ (cf. Figure ci-dessous).

depahasage nul depahasage de 45° depahasage de 90° depahasage de 135 ° depahasage de 180° depahasage de 225° depahasage de 270° depahasage de 315°
Deux signaux sinusoïdaux déphasés de $\phi$ en mode XY.

Manipulation

Réglages

  1. Allumez l'alimentation PHYWE et laissez chauffer pendant environ 10 minutes.
  2. Pendant ce temps, branchez les sorties de l'alimentation à l'oscilloscope. Commutez l'oscilloscope en mode balayage (mode ALT ou CHOP).
  3. Placez le miroir à environ 1 m de la source lumineuse.
  4. Vous chercherez à recueillir le maximum de lumière sur le récepteur pour obtenir sur la voie Y, un signal le plus important possible. Pour cela, ajustez la position verticale et latérale de la première lentille de façon à ce que le faisceau arrive bien au centre du premier miroir. Ensuite, positionnez la seconde lentille de sorte que la tache focale soit exactement au milieu du photorécepteur. Enfin, affinez le réglage à l'aides des vis situées derrière les miroirs.

Mesure de la vitesse de la lumière dans l'air

Première méthode

  1. Placez les miroirs à l'origine de la graduation de la règle et annulez le déphasage entre les faisceaux à l'aide du bouton PHASE.
  2. Commutez l'oscilloscope en mode XY. Observez l'évolution du tracé au fur et à mesure que vous éloignez les miroirs. Cherchez la position $x_{0}$ pour laquelle $\phi=180^{\circ}$. Estimez l'incertitude de la mesure.
  3. Branchez la sortie f/1000 de l'appareil sur le fréquencemètre qui indiquera alors la valeur $f_{\rm mod}/1000$.
  4. À partir de ces mesures, calculez la vitesse de la lumière dans l'air ainsi que l'incertitude de mesure.

Deuxième méthode

  1. Placez-vous en mode balayage. Lancez la mesure du déphasage (commandes sur l'oscilloscope : MEAS $\triangleright$ more $\triangleright$ more $\triangleright$ $\varphi$).
  2. Mesurez la position des miroirs pour laquelle le déphasage vaut $\phi$ = 90°. Effectuez quatre mesures indépendantes. À chaque fois, on procédera aux réglages des appareils, au réglage du zéro et on fera les mesures tantôt en faisant croître $x$, tantôt en le faisant décroître.
  3. Utilisez la méthode statistique de Student, pour déterminer la valeur la plus probable de $x$ ainsi que son incertitude (avec niveau de confiance de 95%).
  4. En déduire la valeur de $c$ (n'oubliez pas l'incertitude).

Bilan

  • Les deux mesures de $c$ sont-elles compatibles entre elles ?
  • Sont-elles compatibles avec la valeur tabulée ? Sinon proposez une explication.

Mesure d'indice de réfraction

La procédure consiste à introduire le matériau étudié sur le parcours de la lumière et à disposer les miroirs immédiatement après le milieu (position $x_1$ déphasage $\phi_1$). On retire le matériau puis on recule les miroirs afin de rétablir le même déphasage (position $x_2$ déphasage $\phi_2$). On note $\ell_{\rm m}$ la distance parcourue par la lumière dans le milieu.

  1. Mesurez $x_1$ et $x_2$ pour le bloc de plexiglas$\circledR$ ainsi que pour le tube rempli d'eau.
  2. Astuce : on gagne en précision en s'arrangeant pour que $\phi_1$ soit un multiple de $\pi$ ce qui est pratique pour comparer $\phi_1$ et $\phi_2$ en mode XY. C'est pourquoi, après avoir placé les miroirs en positions $x_1$, il est conseillé d'introduire un déphasage supplémentaire (bouton PHASE) de façon à obtenir $\phi_1=0$ ou $\pi$.

  3. En déduire les indices de ces deux milieux (n'oubliez pas les incertitudes).
★★★

Matériel

  • un oscilloscope analogique METRIX ;
  • un fréquencemètre ;
  • un générateur PHYWE avec un rail gradué, une paire de miroirs et de lentilles ;
  • un bloc de plexiglas et un tube rempli d'eau.